Détermination de l'âge et analyses chimiques
Le personnel de la Station biologique de St. Andrews (SBSA) mène des études de détermination de l’âge dans le cadre des évaluations des stocks de divers poissons marins afin de formuler des avis scientifiques en matière de gestion des pêches. La détermination de l’âge exact de poissons est essentielle à l’évaluation efficace de l’état des stocks. Les modèles d’évaluation des pêches fondés sur l’âge utilisent l’historique des populations de poissons, y compris l’effectif de chaque classe d’âge, pour prévoir ce qu’il adviendra des différents stocks.
Depuis 1946, les chercheurs de la SBSA examinent les otolithes de poissons de diverses espèces afin de déterminer leur âge. Les otolithes sont des os présents dans la tête des poissons, et de nouvelles couches s’y ajoutent continuellement. En coupe transversale, chaque nouvelle couche constitue un nouvel anneau de croissance, qui ressemble aux anneaux visibles sur une coupe de tronc d’arbre. Le personnel de la SBSA examine les otolithes au microscope afin d’évaluer la croissance, le stade de reproduction et l’âge de poissons. Les données obtenues sont utilisées avec d’autres données biologiques, comme la longueur, le poids et l’état de maturité des échantillons prélevés sur le plateau néo écossais, dans la baie de Fundy, sur le banc Georges et dans le golfe du Maine. Les données obtenues à partir des échantillons prélevés durant les relevés de recherche annuels axés sur les écosystèmes du MPO sont complétées par les données recueillies par les pêcheurs commerciaux et aux ports de débarquement. Toutes les données pour un même stock sont ensuite compilées afin d’obtenir une estimation de l’effectif et de la force des classes d’âge au fil du temps.
Les premiers travaux de détermination de l’âge de poissons effectués à la SBSA portaient sur l’aiglefin. La recherche a ensuite été étendue à la plupart des espèces pélagiques et des espèces de poissons de fond visées par une pêche commerciale. À l’heure actuelle, trois espèces de poissons de fond du golfe du Maine et de la baie de Fundy font l’objet de travaux de détermination de l’âge : la morue, l’aiglefin et la goberge. Le hareng, une espèce pélagique qui se prend dans les fascines et les sennes de la baie de Fundy, fait maintenant aussi l’objet de tels travaux. La SBSA mène également des recherches afin de trouver de nouvelles méthodes pour déterminer avec exactitude
Les techniques de détermination de l’âge ont évolué au fil des ans. Des années 1940 à 1985, la technique de préparation des otolithes consistait à les briser manuellement le long d’une rainure particulière. En 1985, une nouvelle procédure plus précise a été adoptée. Les otolithes sont maintenant enrobés dans de la résine de polyester noire, puis, une fois la résine solidifiée, ils sont coupés en leur centre à l’aide d’une scie de précision. Les coupes transversales peuvent ensuite être montées sur des lames de plexiglas aux fins d’observation au microscope.
Les responsables de l’analyse des otolithes (les lecteurs) comptent le nombre d’anneaux de croissance distincts. Cette méthode paraît simple, mais il est souvent difficile de distinguer les premiers anneaux et les anneaux compacts. Les anneaux se forment lorsque la vitesse de croissance d’un poisson change, que ce soit en raison des saisons, de la disponibilité de la nourriture, d’une variation du niveau d’activité, d’une variation de la température de l’eau ou des périodes de fraie. Ces facteurs modifient la composition du matériau qui constitue les otolithes. Par exemple, les mois où le taux d’alimentation et la vitesse de croissance sont plus élevés, une quantité plus grande de carbonate de calcium se dépose, ce qui donne à l’otolithe une apparence opaque lorsque soumis à une lumière réfléchie. À l’inverse, les mois où le poisson croît plus lentement, la quantité de carbonate de calcium qui se dépose est moindre, ce qui donne des anneaux plus transparents. Un lecteur expérimenté peut faire la différence entre une croissance lente en hiver et une croissance rapide à l’été. Il est plus difficile de déterminer l’âge lorsque les variations saisonnières sont moins prononcées (p. ex. dans le cas des espèces tropicales).
Les otolithes des poissons de fond sont relativement gros, et l’étude de la croissance est plus facile avec ceux ci qu’avec les autres structures osseuses. Pour les espèces de poissons qui ne possèdent pas d’otolithes d’une taille et d’une clarté suffisante (p. ex. le saumon atlantique), il est nécessaire d’utiliser d’autres méthodes de détermination de l’âge, comme le dénombrement des anneaux sur les vertèbres, les écailles ou d’autres structures.
Dans le cas du thon rouge, les premières techniques de détermination de l’âge fondées sur l’analyse des vertèbres ont permis de déterminer que les anneaux doubles se forment au cours d’une même année, ce qui complique la distinction entre la fin d’un anneau et le début de l’anneau suivant. Même si les otolithes du thon rouge sont plus petits et plus difficiles à lire que ceux des poissons de fond, ils demeurent le principal moyen de détermination de l’âge. Par conséquent, les chercheurs de la SBSA recueillent les otolithes des thons rouges pris dans le cadre de la pêche commerciale. De plus, les études sur la composition chimique des otolithes ont permis d’en apprendre davantage sur les migrations du thon rouge.
L’exactitude dans la détermination de l’âge et le contrôle de la qualité est essentielle à la formulation d’avis sur l’état des stocks. Le contrôle de la qualité est facilité par la comparaison des résultats de lecteurs différents. De plus, il nécessite une collaboration avec des collègues états uniens dans le cas des stocks de poissons présents dans les eaux du Canada et des États Unis. Deux lecteurs comparent leurs résultats pour les mêmes otolithes afin d’accroître l’exactitude des résultats.
La comparaison avec les données d’étiquetage constitue une autre méthode de validation des mesures d’âge par les lecteurs. Des poissons capturés à divers endroits dans la région sont identifiés au moyen de petites étiquettes en plastique avant d’être remis à l’eau. Les étiquettes sont récupérées une fois les poissons recapturés par des pêcheurs. Au moment de la recapture, différentes données sont consignées, comme le moment et le lieu de capture, la taille, la longueur et, parfois, le stade de reproduction. La comparaison des estimations de l’âge fondées sur l’analyse visuelle des otolithes avec ces données permet d’accroître l’exactitude des estimations.
L’âge de la plupart des otolithes est déterminé visuellement à l’aide d’un microscope, mais il existe une autre méthode disponible. Cette méthode consiste en l’installation d’un appareil photo sur un microscope et en l’analyse des images prises sur un écran d’ordinateur. Le lecteur peut évaluer chaque image et la conserver dans une base de données. Cette méthode élimine le besoin d’entreposage physique des otolithes. De plus, elle permet au lecteur de marquer l’emplacement des anneaux, ce qui simplifie la formation des nouveaux lecteurs et accroît l’efficacité de la réévaluation des échantillons. Malgré les avantages de cette autre méthode, l’analyse au microscope demeure la technique la plus utilisée puisqu’elle permet d’observer les otolithes dans les trois dimensions plutôt que dans les deux seules dimensions possibles avec l’appareil photo. La SBSA a toutefois créé une bibliothèque exhaustive d’images d’otolithes aux fins de formation, d’ateliers et d’essai.
Équipement : SBSA a récemment acheté une nouvelle scie à précision - Discotom-6 de première classe pour le sectionnement des otolithes.
Otolithes de hareng avec leur emplacement dans le poisson; extraction, et otolithes d'un hareng âgé de 9 ans.