Collaboration scientifique pour la recherche sur l'acidification des océans
En septembre et octobre 2014, les scientifiques de l'Institut Maurice-Lamontagne, un centre de recherche de Pêches et Océans Canada, ont participé à une grande étude des effets de l'acidification des océans sur le phytoplancton, plante unicellulaire microscopique à la base du réseau trophique marin. Pour cette étude, l’équipe du Ministère s'est jointe au groupe de scientifiques et d’étudiants de l'Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER), de l'Université Laval, de l'Institut national de recherche scientifique – Eau, Terre, Environnement (INRS-ETE) et de l'Université McGill, sous l'égide de l'organisation de recherche interinstitutionnelle Québec-Océan. Le projet de recherche était financé par le Fonds de recherche du Québec - nature et technologies (FRQNT) et Pêches et Océans Canada.
À la station de recherche de l'ISMER, à Pointe-au-Père, 12 grands réservoirs – appelés mésocosmes – ont été remplis d'eau de mer provenant de l'estuaire du Saint-Laurent, ajustés pour couvrir une gamme de pH et incubés, sous la lumière naturelle du jour, à deux températures différentes. Pendant trois semaines, les chercheurs ont suivi, entre autres, la croissance des populations de phytoplancton dans les mésocosmes en mesurant l'abondance des diverses espèces, les taux de photosynthèse, la production de chlorophylle, la consommation d'éléments nutritifs, la production de divers composés organiques (notamment les gaz chimiques à l'état de traces), les taux de croissance bactérienne et l'abondance virale.
Un problème inquiétant
La compréhension des effets de l'acidification des océans sur les organismes marins est un grand sujet d'actualité dans le milieu des sciences océaniques. Souvent appelée l'autre problème de CO2, l'acidification des océans a récemment été reconnue comme étant un problème environnemental lié aux changements climatiques anthropiques qui peut devenir très grave.
Depuis le début de l'ère industrielle, les océans ont absorbé environ un tiers du dioxyde de carbone (CO2) émis dans l'atmosphère par la combustion de combustibles fossiles. En se dissolvant dans l'eau, le CO2 produit de l'acide carbonique qui réduit le pH de l'eau de mer, la rendant plus acide (plus le pH est faible, plus l'acidité est élevée). Aujourd'hui, l'acidité des océans est plus élevée de 30 % par rapport à ce qu'elle était avant l'ère industrielle. Si la consommation de combustibles fossiles se poursuit à son rythme actuel, comme si de rien n'était, l'acidité des océans pourrait augmenter de 100 % d'ici la fin du siècle. Il n'y a pas eu de changements d'une telle ampleur sur une aussi courte période depuis au moins 20 millions d'années, et il y a de quoi s'inquiéter de la capacité des écosystèmes marins à s'adapter.
Les effets de l'acidification sur les organismes marins sont multiples, mais ils toucheront plus particulièrement les espèces osseuses, à coquille ou à carapace contenant du carbonate de calcium. C'est le cas notamment des coraux, des mollusques à coquille, de nombreux crustacés et de nombreuses espèces de plancton. Les niveaux de carbonate de calcium baissent lorsque le pH est faible. L'acidification des océans rendra donc la croissance et la reproduction normales de nombreuses espèces plus difficiles.
Toutes les conséquences de l'acidification des océans pour la croissance du phytoplancton en milieu naturel ne sont pas encore connues. Les résultats de cette expérience et d'autres menées à travers le monde sont actuellement étudiés de près. On ignore encore dans quelle mesure le phytoplancton peut s'adapter à l'acidification à long terme. Des recherches supplémentaires sur cette question devront être menées dans les prochaines années avant que tous les effets de l'acidification des océans puissent être bien compris.
Michael Scarratt
Science
À la station de recherche de l'ISMER. Le toit transparent du mésocosme et les points de prélèvements internes.